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L’inconscient politix d’Astérix

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Détail d'un dessin réalisé pour la couv' du Figaro magazine, en 2001.

Comme à chaque fois qu’il s’agit de s’attaquer au « phénomène Astérix », les exégèses de l’oeuvre de Goscinny et Uderzo (et désormais de Conrad et Ferri) foisonnent, notamment sur l’orientation politique des héros et de la série. Nouvelle confirmation, à l’occasion de la sortie d’Astérix chez les Pictes et de l’actuelle grande expo qui leur est consacrée à la BNF.

Olivier Maison, dans Marianne (numéro du 2 novembre) y trouve des valeurs « qui sentent bon l’universalité : l’esprit de résistance, la liberté, la solidarité, la démocratie et surtout la découverte de l’autre« . Le Nouvel Observateur, de cette même semaine, y consacre lui, même un vrai petit dossier, statuant pour le décréter « identitaire ou postcolonial » (plutôt le deuxième), « républicain ou communautariste« , « platonicien ou soixante-huitard » voire « gaulliste ou mendésiste » (là encore, plutôt la seconde catégorie, selon l’hebdo de la gauche…. mendésiste). Peu avant, France Inter avait sollicité Hubert Védrine et Roselyne Bachelot sur ce même thème.

Plus amusant, la classification du célèbre gaulois par les politiques eux-mêmes (toujours dans le Nouvel Obs). Hervé Morin (Nouveau Centre) y voit un « village conservateur, qui considère qu’il n’y a rien de bon chez les autres et où les voisins se tapent tout le temps dessus. C’est certainement un village de droite« . Alexis Corbière, du Parti de Gauche, à l’inverse, les considèrent comme de sympathiques « franchouillards » plutôt portés sur l’égalité (valeur de gauche) : « Solidarité entre les gens, égalité dans le village. Tout le monde y a la même hutte. » Le ministre du Travail, social-libéral bon teint, Michel Sapin l’analyse comme un « village anti-mondialisation parfait« , rêve enfui ou appel inconscient au nécessaire « changement » néo-libéral :  « tout le monde garde le même emploi toute sa vie (…) personne ne vieillit. Aucune technologie nouvelle ne vient bouleverser la vie économique. Personne n’y a à y gérer la question des retraites ou de la reconversion professionnelle. Les Gaulois résistent non seulement à la mondialisation romaine, mais aussi au temps qui passe« .

Hervé Morin et Jean-Vincent Placé s'y croient déjà...

Et sa seule critique (mais est-ce vraiment une critique alors que son collègue Moscovici lui-même a lancé le thème du « ras-le-bol fiscal » ?) : « Les villageois paient un impôt, mais qui va aux Romains. C’est l’expression d’une vieille idée: quand on paie ses impôts, ce n’est jamais pour soi, on ne sait pas où ça va… »

Enfin, Jean-Vincent Placé, sénateur d’Europe-Ecologie (qui a le profil et la délicatesse requises pour jouer Obélix), il parvient, dans la même interview à faire de la France d’Astérix un village à « l’identité forte« , « miroir de la France d’avant 1968, orgeuilleuse, ordonnée, paternaliste« , tout en n’étant « pas vraiment nationaliste« , aidant ses voisins étrangers, acceptant le progrès et les hérauts de « la décision collective« …

A défaut d’avoir vraiment une réponse politique claire au positionnement d’Astérix, au moins a-t-on la confirmation qu’on peut se saisir de lui pour lui faire tout dire ou tout endosser. Question de point de vue et d’angle. Démonstration, surtout, de l’incontestable talent de la série à échapper au catalogage. Et ce n’est pas nouveau. En 2001, c’était le Figaro magazine qui faisait témoigner les ténors politique de l’époque. Et encore avant, en 1966, déjà, l’Express avait consacré sa « Une » au « Phénomène Astérix » (événement plus que rare à l’égard de la BD à l’époque) et le New York Times avaient bien noté que le petit Gaulois arrivait à incarner l’inconscient des Français dans toute ses dimensions…


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